C’est l’un des événements éditoriaux de ce premier trimestre : avec «
Les Grandes Batailles navales », Glénat se lance dans une nouvelle série
conceptuelle historique digne des collections qui ont forgé sa
réputation, de
Vécu à
Ils ont fait l’Histoire. De la
Guerre d’Indépendance américaine (« Chesapeake », 1781) jusqu’au premier
affrontement naval de la Première Guerre mondiale (« Jutland », 1916)
en passant par la célèbre victoire de Nelson à « Trafalgar » (1806),
c’est l’infatigable Jean-Yves Delitte qui a tenu la barre pour se porter
sur tous les fronts. Confectionnant scénarios, couvertures, planches et
dossiers documentaires, l’auteur de « Black Crow » et du « Sang des
lâches », par ailleurs Peintre Officiel de la Marine Belge, nous offre
un impressionnant voyage maritime dans le temps…
- Les titres annoncés chez Glénat en 2017
- Deux voyages avec Delitte au XVIIIe siècle : L’Hermione et Le Sang des lâches
- 1er coup frappé pour Trafalgar (Planche 3 – Glénat 2017)
Peintre official de la Marine, membre titulaire de l’Académie des
arts & sciences de la mer, architecte et designer de formation,
Jean-Yves Delitte a, depuis ses débuts dans le journal
Tintin
en 1984, largement prouvé son expérience dans les domaines de la mer et
du récit historique. Après avoir narré les péripéties du trois-mâts « Le
Belem » (2 albums publiés en 2006 et 2008 chez Glénat), les aventures
du corsaire amérindien Black Crow (9 titres depuis 2009 dont trois
hors-séries consacrés à L’Hermione, à l’expédition de La Pérouse et aux
mutinés de La Bounty), Delitte avait momentanément quitté la marine à
voile au profit des « U-Boot » (uchronie sur 4 titres entre 2011 et
2015). Suivront encore chez Casterman les deux tomes du « Sang des
lâches » (2014 et 2016) narrant une double enquête criminelle menée à
vingt ans d’écart au XVIIIe siècle entre Angleterre et Java. Pour
l’actuelle série « Les Grandes Batailles navales », Delitte, séduit par
une idée proposée par Philippe Hauri (éditeur chez Glénat) en 2015,
s’est immédiatement lancé dans un vaste travail de repérage, tout en
recrutant une poignée de collaborateurs chevronnés. Parmi ces derniers,
citons Denis Béchu (dessinateur de « Trafalgar »), Roger Seiter et
Christian Gine (qui raconteront la bataille de « Stamford Bridge »,
tenue en 1066 entre Anglais et Vikings norvégiens), ainsi que Federico
Nardo (illustrateur de « Lépante », en 1571). Outre ces deux futurs
albums (à paraître en octobre 2017), signalons encore – parmi les
livraisons annoncées dans les mois à venir – « Tsushima » (1905), «
Hampton Roads » (1862) et « Salamine » (480 av. J-C.), tous composés par
le seul Delitte !
La collection initiée par Glénat n’est sans rappeler les grandes
manœuvres éditoriales qui ont déjà fait date dans le milieu de la bande
dessinée : citons pour mémoire
Les Grandes Batailles de l’Histoire
(10 titres publiées chez Larousse entre 1983 et 1985) ou les « Récits
de guerre » de Dimitri (intégrale par Glénat en 2013). Les amateurs du
genre suivront actuellement les différentes séries militaristes (de la
Première Guerre à nos jours) diffusées par Zéphyr BD, les éditions du
Triomphe (voir par exemple les 4 tomes de « La Grande Fresque de la
Marine ») ou les titres des collections
Mémoire et
Cockpit
(Paquet). Concernant Delitte, la plus grande difficulté avouée fut de
ne pas sombrer (sic) dans le didactisme par trop académique. Suivant le
simple marin plutôt que le bel officier tout en rejetant le strict cadre
du seul récit historisant, Delitte n’a pour autant pas négligé ses
lecteurs les plus pointilleux : ceux-ci pourront retrouver en fin de
chaque album de 45 planches un dossier historique constitué de 8 pages
illustrées, au contenu fort dense. Cet incroyable travail de
documentation permettra d’accepter sans difficulté la part
d’interprétation graphique offerte par le ou les auteurs dans les pages
précédentes au regard de la grande Histoire.
- La Grenouille – Dessin encré par Denis Bechu pour « Trafalgar »
- Le Redoutable – Dessin encré par Denis Bechu pour « Trafalgar »
Pour « Trafalgar », les lecteurs suivront ainsi autant les
atermoiements de la flotte française (commandée par l’hésitant
vice-amiral de Villeneuve) que les interrogations des marins postés
entre fonds de cales et huniers. Alors que la flotte franco-espagnole
devait attirer la Royal Navy pour permettre l’invasion de l’Angleterre
par la Grande Armée, le plan se retourne contre les Français : Horatio
Nelson livrera une bataille plus que mémorable… Quelques années plus
tôt, dans la baie de « Chesapeake », une courte canonnade met fin aux
espoirs anglais de briser l’encerclement des troupes de Cornwallis à
Yorktown : l’Indépendance des 13 colonies américaines est acquise.
Multipliés par quatre par Louis XVI, les budgets de la Marine (qui sont
alors de 74 millions de livres) permettent heureusement à la France de
tenir tête à son éternelle rivale britannique. En couvertures de ces
deux albums aux sujets et motifs finalement très proches, Jean-Yves
Delitte a dessiné les escadres en plein combat : on pourra y observer
les terribles ravages exercés par de pleines salves tirées à bout
portant. Les matures, voilages, vergues et décors baroques, éclatés,
enchevêtrés, amoncelés sur les ponts, offrent un spectacle dantesque
dont on imaginera sans mal les conséquences humaines. Fendant l’écume au
travers d’une tempête de fer et de feu, chaque bâtiment représenté
conserve encore son aura et une certaine majesté. Il n’y a en quelque
sorte pas de grandes batailles navales sans grands navires de guerre.
- Couverture et visuels par J.-Y. Delitte pour « Jutland » (Glénat 2017)
- Jutland (planche 2) : missions et renseignements
Dernier des trois albums proposés ce mois-ci, « Jutland » nous
propulse jusqu’en mai 1916 : en Mer du Nord, aux larges des côtes
danoises, la Royal Navy s’apprête à affronter la Kaiserliche Marine
allemande, dont la qualité des équipages était incontestable. Comme
l’illustre dramatiquement le visuel de couverture, le destin des
protagonistes, hommes d’équipages ou officiers (tous embarqués sur l’un
des 249 navires impliqués), ne sera guère plus enviable puisque
déterminé par les tirs échangés entre croiseurs et dreadnoughts
(cuirassés) à plus de 9 kilomètres de distance ! En immersion d’une
époque à une autre, le lecteur prendra dans tous les cas conscience des
fortunes ou infortunes des mers, au sein de batailles ayant souvent joué
un rôle déterminant pour l’avenir des peuples et du monde.
- A paraître : Hampton Roads, La Hougue, Salamine, Lépante, Stamford Bridge…
Philippe TOMBLAINE
« Les Grandes Batailles navales T1 : Trafalgar » par Denis Béchu et Jean-Yves Delitte
Éditions Glénat (14,95 €) – ISBN : 978-2344012666
« Les Grandes Batailles navales T2 : Chesapeake » par Jean-Yves Delitte
Éditions Glénat (14,95 €) – ISBN : 978-2344020920
« Les Grandes Batailles navales T3 : Jutland » par Jean-Yves Delitte
Éditions Glénat (14,95 €) – ISBN : 978-2344011348
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