Par Patricia Jolly
Sur les haubans, le pavillon bleu-blanc-rouge et la Bannière Etoilée flottaient en parfaite symétrie, et ce symbole comptait double. Quelle ironie, en effet, que d’entrer aux Etats-Unis par la mer, au lendemain de l’annonce par le président Donald Trump de la démission de son climato-sceptique ministre de l’environnement, Scott Pruitt, après avoir traqué des jours durant les micro-plastiques qui infestent le Great Pacifique Garbage Patch...
Dans sa bannette, Maria Luiza Pedrotti, chercheuse en biologie marine du Laboratoire océanographique de Villefranche-sur-mer (Alpes-maritimes), cheffe de mission scientifique sur Tara, et auteure avec son équipe d’une campagne d’échantillonnage hors norme dans la grande poubelle de plastique du Pacifique tournait et se retournait. Les dizaines de mises à l’eau de ses filets collecteurs désormais lavés et remisés, et les 300 et quelques cryo-tubes bourrés de micro-plastiques qui dormaient dans les congélateurs du bateau dans l’attente d’être minutieusement analysés par différents laboratoires -français, américain et monégasque- étaient un motif de satisfaction mais l’avenir proche lui posait question.
Nous l’avons laissée avec sa question à bord de Tara, dans le port d’Astoria, pour regagner la France en souhaitant que les consommateurs de produits plastiques comprennent dans l’instant l’urgence d’un changement de comportement sans attendre les résultats des analyses. La goélette qui doit maintenant faire escale à Portland (Oregon) repartira ensuite pour San Diego, afin de poursuivre l’expédition Tara Pacific, un périple entamé il y a deux ans, pour mesurer l’impact du changement climatique sur les récifs coralliens du Pacifique. Il doit s’achever le 27 octobre dans son port d’attache de Lorient.
#Plastique Pacifique : Le Monde met le cap sur le Great Pacific Garbage Patch, la « soupe » de micro-plastiques du gyre du Pacifique nord. Embarqués sur la goélette scientifique Tara pour un périple de trois semaines entre Honolulu (Hawaï) et Portland (Oregon), notre journaliste Patricia Jolly et le photographe Samuel Bollendorff vous emmènent au coeur de cette mixture mitonnée par l’homme qui rejette chaque année 8 millions de tonnes de plastiques en mer.
Dix septième et dernier jour de mer… Soudainement le sondeur de Tara n’a plus indiqué que quelques centaines, puis quelques dizaines de mètres de profondeur. A la lueur des feux de navigation de la goélette, le bleu profond de l’océan Pacifique a tourné au vert boueux, marque de sa rencontre avec les alluvions de la Columbia River. De puissantes odeurs terriennes nous ont assaillis tandis que la VHF, mutique depuis Honolulu, se remettait à crachoter les messages des gardes-côtes et du bateau-pilote orange dépêché pour nous chaperonner entre les collines boisées d’Astoria (Oregon) qui barraient l’horizon rougeoyant.Sur les haubans, le pavillon bleu-blanc-rouge et la Bannière Etoilée flottaient en parfaite symétrie, et ce symbole comptait double. Quelle ironie, en effet, que d’entrer aux Etats-Unis par la mer, au lendemain de l’annonce par le président Donald Trump de la démission de son climato-sceptique ministre de l’environnement, Scott Pruitt, après avoir traqué des jours durant les micro-plastiques qui infestent le Great Pacifique Garbage Patch...
Route vers le port d’Astoria
Comme pour fêter cela, Stéphane Mazevet, astrophysicien de l’Observatoire de Paris et invité du bord, a grillé un cigare en contemplant la terre que nous avions perdue de vue depuis des jours avec l’assurance de l’homme prêt à conquérir une exoplanète. Le photographe Samuel Bollendorff s’est mis à mitrailler le lever du soleil, sujet qui d’ordinaire répugne l’artiste qui sommeille en lui. Le capitaine Yohann Mucherie, lui, a entrepris le nettoyage du pare-brise du poste de pilotage, histoire d’épater le pilote d’Astoria, Steven Ackerman, prêt à sauter sur Tara pour la mener à quai. Obligeamment, le capitaine Ackerman, un John Wayne en veste de quart fluo et jeans repassés, a offert un casquette au maître de notre bord. Puis il s’est appliqué à pointer du doigt tout au long du chenal les meilleurs pubs de sa ville surnommé « la petite San Francisco » pour son relief accidenté. L’on pouvait dés lors gager qu’il y aurait sous peu quelques marins français pour chanter dans le port d’Astoria.Dans sa bannette, Maria Luiza Pedrotti, chercheuse en biologie marine du Laboratoire océanographique de Villefranche-sur-mer (Alpes-maritimes), cheffe de mission scientifique sur Tara, et auteure avec son équipe d’une campagne d’échantillonnage hors norme dans la grande poubelle de plastique du Pacifique tournait et se retournait. Les dizaines de mises à l’eau de ses filets collecteurs désormais lavés et remisés, et les 300 et quelques cryo-tubes bourrés de micro-plastiques qui dormaient dans les congélateurs du bateau dans l’attente d’être minutieusement analysés par différents laboratoires -français, américain et monégasque- étaient un motif de satisfaction mais l’avenir proche lui posait question.
Un an d’analyses
« Comment faire comprendre au public que le résultat de notre travail n’est pas instantané et que nous avons besoin d’un an pour mener des analyses minutieuses sur la génomique, la génétique bactérienne, les champignons, les cyano-bactéries, la faune et la flore qui colonisent les plastiques, ou sur leur concentration et leur taille, avant de pouvoir mettre en commun nos résultats pour dresser un état des lieux précis de la pollution dans le Pacifique nord permettant aux décideurs d’adopter des mesures concrètes pour en venir à bout ? », s’interrogeait la scientifique la veille, à l’issue de la présentation de son projet par Skype au ministre de la Transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, à l’occasion d’un comité inter-ministériel de la biodiversité.Nous l’avons laissée avec sa question à bord de Tara, dans le port d’Astoria, pour regagner la France en souhaitant que les consommateurs de produits plastiques comprennent dans l’instant l’urgence d’un changement de comportement sans attendre les résultats des analyses. La goélette qui doit maintenant faire escale à Portland (Oregon) repartira ensuite pour San Diego, afin de poursuivre l’expédition Tara Pacific, un périple entamé il y a deux ans, pour mesurer l’impact du changement climatique sur les récifs coralliens du Pacifique. Il doit s’achever le 27 octobre dans son port d’attache de Lorient.
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