Dans la nuit du 8 au 9 décembre 1890, le cargo Louise-Jenny talonnait en face de Penmarc’h. L’épave sera allégrement pillée par des riverains. Ils seront lourdement condamnés par le tribunal de Quimper.
Une cinquantaine de prévenus. Quatre audiences. Et à la clé, de lourdes peines dont de la prison ferme. En cette année 1891, le tribunal de Quimper ne ménage pas ses efforts pour condamner les pilleurs du Louise-Jenny. Le cargo, rempli de marchandises, s’était échoué en face de Penmarc’h sur les Étocs, dans la nuit du 8 au 9 décembre 1890. Les voleurs, essentiellement des Penmarchais, des Treffiagatois et quelques Guilvinistes, avaient été pris, pour la plupart, en flagrant délit.
Sur le banc des accusés, on retrouve de nombreux marins-pêcheurs. Les femmes sont aussi dans le coup. Les vols se déroulent lors d’expéditions nocturnes. Boîtes de conserve d’ananas, margarine, raccord en cuivre, cuir de veau, manomètres, caisses d’alcool… La précieuse cargaison tombe à pic en cette veille de Noël. À cette époque, encore beaucoup, parmi la population maritime bigoudène, ne mangent pas à sa faim. L’épave sera visitée pendant des mois. Le revolver, les deux fusils ainsi que la montre du capitaine qui se trouvaient dans sa cabine ont également disparu. Des procès-verbaux seront dressés par la Marine et la Douane.
800 m3 de marchandises
Retour le 7 décembre 1890. Ce jour-là, on met fin au chargement du Louise-Jenny. En soirée, le cargo mixte (à voile et à vapeur), construit en 1877, propriété de la Maison Worms & Cie, quitte les quais du port de Bordeaux. Destination : Le Havre. Il transporte près de 800 m3 de marchandises. Sur le pont sont amarrés 100 barils d’essence de térébenthine. Le 8 décembre, le navire de 70 m de long met le cap au nord-ouest. La mer est calme, la visibilité moyenne. Mais bientôt, des bancs de brume épaisse entourent le bateau par intermittence. Vers 19 h, le Louise-Jenny croise Belle-Ile. À minuit, le bâtiment arrive à proximité de Penmarc’h. Une épaisse brume couvre maintenant la mer. L’homme de veille n’a pas remarqué le feu à éclipses du phare de Saint-Pierre (*). Pas surprenant : ce feu à huile minérale, d’une portée de 22 milles, a une puissance insuffisante pour percer la brume.
La chaudière menace d’exploser
À 00 h 30, un choc violent stoppe la course du cargo. Celui-ci vient de toucher le fond. L’équipage tombe littéralement du lit. C’est la plus grande confusion à bord. L’eau s’engouffre dans la salle des machines et dans la cale. La chaudière menace d’être submergée et par voie de conséquence d’exploser. Le navire est perdu. La sirène est actionnée. Le capitaine ordonne l’évacuation du navire sur les trois canots du bord. Les hommes, 21 au total, sont dans la nuit froide entourés de rochers. Énorme soulagement lorsqu’ils aperçoivent le canot Sainte-Thumette venir à leur rencontre. Les sauveteurs de Kérity ont entendu l’alarme retentir. Les naufragés sont sauvés.
La coque du Louise-Jenny fut en partie découpée et récupérée par un ferrailleur. Il n’en reste aujourd’hui que quelques morceaux de tôle éparpillés près de la roche Ar Bleiz, par 7 m de fond.
* Le phare d’Eckmühl sera construit quelques années plus tard, en 1897.
Sources : le livre « Tempêtes et naufrages en Pays bigouden » de Roland Châtain et le site web de Jean-Louis Guégaden, kbcpenmarch.
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