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Yves-Joseph de Kerguelen-Trémarec


Yves-Joseph de Kerguelen-Trémarec
(1734-1797)

Né en 1734 au manoir de Trémarec à Landudal (Sud Finistère), Yves-Joseph de Kerguelen-Trémarec avait déjà une brillante carrière derrière lui quand, en Mai 1771, il partit de Lorient pour l'Océan Indien. Lieutenant de Vaisseau en 1763 il avait inventé un nouveau type de bâtiment, la corvette-cannonière, apte aux débarquements. En 1767 il a commandé la frégate "la Folle" puis en 1768 la corvette "l'Hirondelle" comme stationnaires dans les parages de l'Islande, pour protèger les pécheurs Français et Flamands (on dirait maintenant "assistance aux pêches"), et s'est familiarisé avec les mers sub-polaires, en naviguant entre le Groenland et Bergen. Entre les deux missions il s'est livré à du renseignement, pendant 6 semaines en Angleterre, "pour examiner, sans se faire connaitre, la construction navale des Anglais...". De la seconde mission il a ramené du Groenland deux oursons blancs pour la ménagerie du Roi.
Sa première mission d'exploration dans les mers du Sud commença par une escale à l'île de France (l'actuelle île Maurice). Kerguelen y sera bien acueilli par le gouverneur le chevalier des Roches et l'intendant Poivre (ancètre d'un journaliste connu). Grace à eux il remplace le "Berryer", vaisseau mauvais marcheur avec lequel il était parti de Lorient, par la flûte "La Fortune" de 24 canons et la gabarre "Le Gros-Ventre" de 16 canons.
Kerguelen rencontrera aussi sur l'île des gens intéressants : Marion-Dufresne, lui aussi en mission (il découvrira les îles Crozet), Commerson, ancien naturaliste de Bougainville (il a donné son nom à une espèce de dauphin), un certain Galaup de Lapérouse alors jeune enseigne de vaisseau avec son camarade Fleuriot de Langle (futur commandant de "l'Astrolabe"). Toute la fine fleur des navigateurs est là!
En Février 1772, "La Fortune" et "Le Gros-Ventre" sont dans le Sud de l'Océan Indien, quand le 12, Yves de Kerguelen sur "La Fortune" aperçoit les îles qui porteront son nom. Il croit avoir atteint le continent Austral, et donne à cette terre le nom de France Australe sans pouvoir débarquer à cause du mauvais temps.
Après concertation avec Louis Alesno de Saint-Allouarn second de l'expédition et commandant le "Le Gros-Ventre", Kerguelen lui envoie l'Enseigne de Rosily-Mesros (futur Amiral et Comte d'Empire) avec le grand canot de "La Fortune", pour tenter un débarquement.
Deux jours plus tard, avec beaucoup de dificultés, l'Enseigne de Boisgnehennec, second du "Le Gros-Ventre" débarquait avec de Rosily-Mesros et prenait possession du territoire au nom du Roi Louis XV.
Une tempète ayant alors séparé les deux navires, Kerguelen rentra en France, sans attendre Saint-Alouarn et "Le Gros-Ventre"... ni Rosily-Mesros. Il arrivait à Brest le 16 juillet 1772.
JF de Lapérouse nous dit "il fut reçu en France comme un nouveau Christophe Colomb"
Kerguelen sera reçu à Versailles, et il semble qu'il ait alors fait une description un peu optimiste de sa découverte : "Les terres que j'ai eu le bonheur de découvrir paraissent former la masse centrale du continent antarctique... la France australe fournira de merveilleux spectacles physiques et moraux...". Avec de tels propos Kerguelen réussit sans peine à convaincre le Roi, amateur de sciences naturelles, d'ordonner une autre expédition.
Pendant ce temps "Le Gros-Ventre" continuait plus sérieusement la campagne d'exploration, ne regagnant l'île de France que le 5 septembre 1772, après avoir exploré Timor et des côtes Australiennes, Rosily-Mesros y accomplissant notament de très bons relevés hydrographiques. Hélas Alesno de Saint-Alouarn mourra peu après son arrivée. (un récit de cette expédition est donné à http://www.guengat.com/4/SaintAlouarn2.html)
Cette fois on a armé, à Brest, deux navires plus importants: "Le Rolland" (vaisseau de 64 canons, qui est trop gros et donc mal adapté à ce genre d'expédition) et "L'Oiseau" (frégate de 32 canons). A bord on a embarqué tout le matériel nécessaire, y compris deux astronomes, un naturaliste et un ingénieur, en tout 700 hommes.
L'expédition sera pour le moins folkorique, en effet Kerguelen a aussi embarqué, en plus de 3 passagères pour l'Ile de France, sa maitresse Louison, dont la présence cause quelques troubles parmi l'équipage et l'état major. On a affronté tempètes et maladies (normal avec des femmes à bord : il est bien connu que ça porte malheur). Des Roches et Poivre, amis de Kerguelen, ayant été remplacés, l'accueil à l'Ile de France n'est plus celui de la mission précédente, il est même tout à fait déplaisant. On adjoint tout de même à l'expédition le senau "La Dauphine".
En Décembre 1773, les 3 navires découvrent la (triste) réalité des "îles de la Désolation". C'est James Cook qui, par "fair-play" ou par ironie, donnera à l'archipel le nom d'îles Kerguelen au cours de son troisième voyage, en 1776, pendant la disgrace de Kerguelen "l'ennemi des Anglais".

De son retour à Brest, JF de Lapérouse nous dit assez méchament "M. de Kerguelen revint en France ausi peu instruit que la première fois...". C'est vrai que cette fois encore Kerguelen n'a pas débarqué sur les îles qui porteront son nom, confiant cette mission à ses subordonnés. En conflit avec certains de ses officiers, notamment à cause de "la Louison", Kerguelen sera traduit en Conseil de guerre, cassé de son grade et emprisonné à Saumur. Cage plutôt dorée... Le prisonnier sympatisera avec le gouverneur du château et son fils Aristide Dupetit-Thouars, futur héros de la bataille d'Aboukir, qui a alors 15 ans.

Mais ce n'est pas fini! Libéré en 1778, il arme un corsaire pendant la Guerre d'Amérique.

En 1781, il part pour un nouveau voyage sur le Liber Navigator, une corvette, armée à ses frais et surtout par des associés : des associés dont le marquis de Louvois et des membres de la famille d'armateurs Peltier : Thadée, Paul et le mari de sa soeur M. Cotelle. La corvette sera hélas capturée par les Anglais et Kerguelen sera prisonnier en Irlande.

Rallié à la Révolution, il est promu contre-amiral, participe avec courage au combat de Groix (juin1795), mais est à nouveau emprisonné, cherche à se faire réintégrer et meurt solitaire, à Paris, le 3 Mars 1797, alors qu'il était présenti pour le Ministère de la Marine.



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